鋼鐵容顏

Po-Chun Liu’s plants of wire and iron slivers

 

Author/Didier Scuderoni[1]

When I was given the difficult task of developing a new aesthetic for the reconstruction of the Caisses d’épargne’s fronts, I didn’t know how to enrich these spaces on which wrecked metals with polychromy between rust and superficial slivers appeared to collapse. Concretions were scattered across the surfaces; the polish had succeeded in creating nearly lunar, strange surfaces. This is what I felt when I discovered the amazing landscapes of Po-Chun Liu: the joy of the resurrection!

I’ve visited Taiwan several times and observed the vibrant dynamics of a school of creators who understand how to capitalize on their isolated environment while also enriching their technical and graphic expression through contact with successive international exhibitions, as well as exchanges and cultural events. This dynamic could only be injected by the creator, now known in France as “the sculptor of the dragon’s display case” at the Musée de l’Homme, into plant elements gleaned from his readings and visits, concentrated through his most intense obsessions, and reborn during these vast metal frescoes.

Some twenty years ago, I had the pleasure of exhibiting works of art, including one, “L’arbre à Lettres,” that reminds me of the metallic, iron elements that are so prevalent in the arborescent forests of Bresdin, a marginal intaglio engraver of the French 19th century, an artist who was restless and constantly creating. The work of another intaglio engraver responds to Bresdin: Rubel, a creator who brings his characters to life in clouds that are both earthly and buoyed by the evanescence of the past. Po-Chun Liu is a universal artist, able to adapt to his inspirations and impulses a world that gives him strength, the strength of a demiurge ruler.

Similar to a metallurgist, a blacksmith, a strategy gambler, Po-Chun Liu’s install planes of various sizes that compel the observer to penetrate or avoid those cursed, sacred lands, marked with a strong ritual. In July 2020, the large audience of Montmartre will have the opportunity to see an anthology of new works, metal clusters from which emerges a humanity sense particularly relevant to this place where Picasso and his fellow artists formerly wrestled with metal almost a century ago. Their artworks are displayed at various historical institutions, from art museums to town squares and urban parks.

Let us wish Po-Chun Liu, a former student of the Beaux-Arts de Paris and a celebrated sculptor in the contemporary art world, that his works will soon join this unique heritage comprised of sculptures that the French tradition continues to advance to maintain the harmony between civil and religious architecture, each work being a unique element, the heart of a unique refinement.

[1] Didier Scuderoni is director of exhibitions at the Musée Chinois du Quotidien in Lodève (France). He is a lecturer at the Catholic Institute of Paris and is a letter painter, cabinetmaker and ceramist. He is scenographer in museums and patrimonial spaces in France and in Asia.

 

 

Les végétaux de fil et d’éclats de fer de Liu P’o-chun

 

Par Didier Scuderoni [1]

Lorsque j’ai eu la lourde charge  de la mise en œuvre d’une esthétique nouvelle pour la réfection des devantures des Caisses d’épargne, je ne voyais pas comment mettre en valeur ces espaces sur lesquels des métaux ruinés à la polychromie entre rouille et éclats superficiels, semblaient rendre l’âme. Des concrétions s’étaient réparti les surfaces ici et là ; à un poli continuel avaient succédé des surfaces quasi lunaires, fantastiques. C’est ce que j’ai retrouvé quand j’ai eu la plaisante surprise de discerner les paysages fantastiques de Liu P’o-chun : le plaisir d’une résurrection !

J’ai eu l’opportunité  d’aller à Taiwan plusieurs fois, de constater la dynamique forte d’une école de créateurs qui sauront autant tirer parti de leur environnement insulaire  qu’enrichir leur expression technique et graphique au contact des expositions internationales qui se succèdent, ou, autant par l’importance des échanges et événements culturels. Cette dynamique, le créateur connu maintenant  en France comme « le sculpteur de la vitrine du dragon » du Musée de l’Homme, ne pouvait que continuer de  l’insuffler à des éléments végétaux nés de ses lectures, de ses visites, concentrées à travers ses obsessions les plus intenses pour qu’elles renaissent au fil de ces vastes fresques de métal.

J’ai, voilà une bonne vingtaine d’années, eu le plaisir d’exposer des pièces dont l’une, L’arbre à lettres, me renvoie à ces éléments ferreux, métalliques, si présents dans les forêts arborescentes de Bresdin, graveur en taille-douce et marginal du XIXe siècle français, créateur inquiet auquel répond l’œuvre gravé de Rubel, autre graveur en taille douce qui confine dans une intensité minutieuse ses personnages  dans des nuées aussi terrestres que dopées par les évanescences des temps révolus.

Liu P’o-chun est un créateur universaliste en ce qu’il sait adapter à son inspiration, à ses besoins un monde qui le rend fort, mais avec la force d’un démiurge régnant très naturellement sur son univers.

Un peu à la manière d’un métallurgiste, d’un maréchal-ferrant, d’un joueur stratège, Liu P’o-chun campe des plans de différentes importances qui forcent, à son insu, le spectateur à pénétrer ou tout autant à rester en retrait de ces terrains maudits, sacrés, empreints d’un rituel fort.

En juillet 2020, le public important qui foule le sol de Montmartre aura la possibilité de faire face à un florilège de nouvelles œuvres, groupes métalliques d’où se dégage une humanité qui convient tout à fait  à ce village où Picasso et ses compatriotes ont, voilà quasiment un siècle, pu se colleter au métal ! Leurs œuvres, outre les musées, sont maintenant dans les établissements patrimoniaux les plus divers, tout autant qu’elles ont parfois pris possession des places, jardins de la capitale ou de villes françaises.

Souhaitons à Liu P’o-chun, ancien étudiant des Beaux-Arts de Paris, sculpteur adulé de l’art contemporain, que dans un futur proche, ses œuvres puissent, elles aussi, rejoindre ce patrimoine unique constitué par les sculptures que la tradition française ne cesse de mettre en avant pour que l’harmonie entre l’architecture civile et l’architecture religieuse dont chaque oeuvre est un élément unique reset le cœur d’un raffinement unique.

[1] Didier Scuderoni est directeur des expositions au Musée chinois du quotidien sis à Lodève (France). Chargé de cours à l’Institut catholique de Paris, il est peintre en lettre, ébéniste et céramiste. Il est le concepteur de scénographies dans des musées et espaces patrimoniaux en France et en Asie.